Marine « Plus que les mots, je traduis les cœurs (心) »

Dans cette nouvelle interview, j’accueille Marine Gokura, interprète franco-japonaise spécialisée dans le sport. Elle nous parle de son expérience extraordinaire aux JO de Paris avec l’équipe d’escrime du Japon, de son parcours professionnel et de sa conception du métier.

Photo : ©FIE 2024/augustobizzi/日本フェンシング協会
Marine Gokura entre les entraineurs Erwann le Péchoux et Franck Boidin

TRANSCRIPTION

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Pierre-Marie:
Bonjour Marine.

Marine:
Bonjour Pierre-Marie.

Pierre-Marie:
Merci d'avoir accepté l'invitation pour cette discussion dans mon podcast.

Marine:
Je vous en prie.

Pierre-Marie:
J'avais envie de commencer cette discussion en rentrant directement dans le vif du sujet.

Marine:
D'accord.

Pierre-Marie:
Qu'est ce que vous faisiez entre fin juillet et mi-août à Paris?

Marine:
Alors c'était plutôt entre début juillet et août. J'étais à Paris pour accompagner l'équipe d'escrime japonaise pour les Jeux olympiques de 2024.

Pierre-Marie:
Ça s'est plutôt bien passé, je crois, les Jeux olympiques pour l'équipe japonaise d'escrime…

Marine:
Alors ces JO ont été extraordinaires pour toute l'équipe, toute la fédération d'escrime japonaise. Et au total, on a été la première nation. Parmi toutes les toutes les nations qui ont participé, on a rapporté le plus de médailles, au Japon.

Pierre-Marie:
Dans un sport historiquement français et en France en plus.

Marine:
Oui, et en plus, on a battu plusieurs équipes françaises…

Pierre-Marie:
Ah ok.

Marine:
… pour avoir ces médailles et ça a été un exploit. Donc il y a trois armes pour l'escrime, il y a le fleuret, le sabre et l'épée. Et pour toutes les armes, donc il y a les filles et les garçons qui tirent. Et donc par rapport à ça, donc cette fois-ci, il y a eu toutes les armes qui ont participé. Mais comme il y a des épreuves individuelles et par équipe… Il y a eu… pour l'individuel, toutes les armes ont participé, mais pour les équipes, il y a eu donc le fleuret hommes, fleuret dames, le sabre dames et l'épée hommes qui ont participé. Donc quatre équipes japonaises et on a tous ramené des médailles au Japon ! Donc pour le fleuret hommes, c'était la médaille d'or par équipe. Le fleuret dames, c'était la médaille de bronze par équipe. Le sabre dames était encore la médaille de bronze par équipe et l'épée hommes, la médaille d'argent par équipe. Et on a ramené au total seize médailles au Japon. Donc ça a été un vrai exploit. Et voilà. Et je fais partie de cette équipe parce que il y a au total trois entraîneurs français. Et donc je suis l'interprète officiel de la Fédération d'escrime japonaise.

Pierre-Marie:
D'accord. Donc vous êtes interprète. C'était ma question aussi parce que vous avez dit toujours "On a gagné, on a gagné des médailles."

Marine:
Ah oui, c'est vrai que je me suis pas présentée. Je suis interprète de l'équipe japonaise d'escrime.

Pierre-Marie:
Donc ça veut dire que c'est une collaboration que vous avez commencé il y a longtemps ou c'est vraiment au moment des Jeux olympiques ?

Marine:
Alors j'ai commencé. Donc le premier entraîneur français qui s'appelle Franck Boidin est arrivé au Japon il y a huit ans, en 2017, donc juste après, pas juste après mais donc c'était après les Jeux Olympiques de Rio. Donc il a été entraîneur dans l'équipe du Japon et j'ai commencé… Moi-même, j'ai commencé en 2018 à être donc son interprète. Donc là, ça fait un peu moins de sept ans que je suis interprète de l'équipe du fleuret dames donc, puisque Franck Boidin était entraîneur du fleuret dames. Ensuite, après les Jeux Olympiques de Tokyo, il y a eu deux nouveaux entraîneurs. Donc Erwan Le Péchoux, qui est entraîneur du fleuret hommes, et Jérôme Guth qui est l'entraîneur du sabre, dames et hommes. Donc voilà.

Pierre-Marie:
Donc votre travail a triplé, alors finalement ?

Marine:
Oui, pour être tout à fait honnête, mon travail a triplé. Mais bien sûr, comme je suis la seule interprète de l'équipe, je ne peux pas me tripler non plus parce que l'escrime a beaucoup de compétitions internationales dans l'année. Et donc les destinations sont toutes différentes, que ce soit pour les filles ou les garçons. Ce qui fait que je ne peux pas être présente à tous les week-ends pour toutes les armes, parce que de temps en temps il y a des compétitions les mêmes week-ends. Mais c'est vrai que j'ai eu des… mes six ans ou mes sept ans ont été vraiment très intenses parce que je pense que plus de la moitié de l'année je n'étais pas au Japon. J'ai vraiment accompagné chaque équipe sur place pour les compétitions. Et puis dans la vie, au quotidien, j'ai suivi toutes les équipes pour… Sauf l'épée. Parce qu'à l'épée, en fait, c'était un coach. Il y avait deux coaches ukrainiens que je ne parle pas cette langue, donc. Bon après je pense que ça fait assez quand même de s'occuper de quatre équipes ! Donc je m'occupais du sabre et du fleuret, dames et hommes, mais surtout du fleuret. Et ce qui fait que pour les Jeux Olympiques de Paris, j'ai été présente à partir du pré-stage olympique qui s'est déroulé à Bourg-la-Reine. C'est pour ça qu'on était là depuis début juillet. Et donc on a passé trois semaines intenses pour pouvoir ensuite attaquer les épreuves individuelles, puis par équipes.

Pierre-Marie:
D'accord. Donc effectivement, c'est pas seulement le jour de la compétition, mais c'est la préparation avant les événements, et puis peut-être aussi tout au long de l'année, pendant les entraînements "normaux", entre guillemets.

Marine:
Oui, au quotidien, j'étais là aussi. J'étais partout.

Pierre-Marie:
D'accord. Donc j'imagine que c'était une super expérience à Paris. En plus, le lieu de compétition était assez sympathique, n'est-ce pas ?

Marine:
Oui, au Grand Palais. C'était magnifique. Je ne sais pas si vous vous y êtes allé ou si vous avez regardé les images.

Pierre-Marie:
Je suis allé au Grand Palais déjà parce que j'ai habité à Paris longtemps, mais pas dans le cadre d'une compétition sportive, non.

Marine:
Là, c'était très spécial. En tous cas, c'était très joli. Le soir, ils faisaient comme si il y avait des… Je ne sais pas comment, comment pouvoir décrire le plafond, mais en fait, ils faisaient… Ils mettaient des lumières, ça faisait comme si on était sous des étoiles et tout… Enfin, c'était vraiment magnifique.

Pierre-Marie:
Ah d'accord. Un cadre magnifique. Et alors, pendant la compétition, votre travail, c'est quoi exactement ? Parce que je me demandais… pendant les matchs est-ce que l'entraîneur est autorisé à communiquer avec ses joueurs ? Pendant le match, comment ça se passe ?

Marine:
Vous m'avez posé une bonne question ! Alors je dois vous dire que le jour… Bon, en fait je vous explique. L'escrime est un sport où l'entraîneur a le droit d'être dans la "box", on appelle ça la "coach box" et il y a un entraîneur pour l'épreuve individuelle. Donc il y a un entraîneur pour un athlète. Ensuite, pour l'épreuve par équipe, il y a deux entraîneurs pour l'équipe, donc pour les quatre qui tirent. Et quand j'ai débuté ma carrière d'interprète sportif, j'ai pu être dans la "box".

Pierre-Marie:
D'accord.

Marine:
Donc, il y avait l'entraîneur plus l'interprète. Ensuite, il s'est passé des choses que… euh.

Pierre-Marie:
Les règlements ont changé peut-être, ça n'est plus autorisé ?

Marine:
En fait, il n'y avait pas vraiment de règlement pour l'interprète. Donc en fait, c'était toléré, soi-disant, parce qu'il y avait d'autres nations qui avaient des interprètes. Mais ensuite, donc, à un moment, ils ont commencé à être beaucoup plus stricts. Après, pendant la période du COVID, parce qu'ils se sont dit qu'il y avait trop de gens dans la "box". Et donc pour éviter qu'il y ait trop de gens, je n'avais plus accès donc dans la box, donc soit j'étais juste à côté, parce qu'en général, pendant les compétitions d'escrime, il y a… La salle n'est pas si grande que ça et que en fait, on peut se mettre juste à côté, juste à côté de la barrière pour pouvoir parler. Donc en général, pendant ces six ans, j'ai vraiment été à côté, en train de crier voilà, en train de dire ce que le coach "coachait".

Pierre-Marie:
D'accord, ok.

Marine:
Et par contre le jour des JO, donc les règles étaient vraiment très strictes. En plus, le Grand Palais était immense. Et puis en fait, c'est un cadre vraiment spécial. Donc il y a… N'importe qui ne peut pas avoir accès sur le plateau principal, ce qui fait que je n'ai pas pu être présente sur le plateau. Par contre, à chaque fois, j'étais présente pour chaque "meeting", avant chaque épreuve, chaque match. Donc en fait, j'étais avec toute l'équipe, avec tous les membres de l'équipe, sauf pendant l'épreuve.

Pierre-Marie:
Sauf pendant l'épreuve. Mais c'est encore une fois spécialement pour les J.O. alors que normalement, dans d'autres épreuves, vous pouvez aussi faire ce travail d'interprète pendant le match.

Marine:
Voilà. Mais de moins en moins parce que je ne pouvais pas être dans la "box", mais par contre j'étais plutôt à côté. Donc en plus, tous les arbitres me connaissaient et tout. Donc même si je traduisais à côté, ils ne disaient rien du tout. Mais le jour des JO, c'était vraiment un cadre spécial, donc je n'ai pas pu aider le jour même pendant le match. Mais avant chaque… Le matin même, quand le coach avait besoin de parler avec les athlètes ou après chaque match pour faire un débrief ou pour parler du match suivant, de l'adversaire et tout, j'étais présente à l'arrière.

Pierre-Marie:
Et alors, à la base, est-ce que vous aviez une connaissance de ce sport, des termes techniques, etc ?

Marine:
Pas du tout.

Pierre-Marie:
Pas du tout.

Marine:
Bon, je connaissais ce sport, bien sûr. Bon, je pense qu'il est vraiment connu en France. Et par contre, je ne connaissais pas vraiment bien les règles et surtout je ne connaissais… je ne savais pas qu'il y avait trois armes. Je ne savais pas que les règles étaient différentes selon les armes. Et c'est vraiment un sport que j'ai découvert avec le fleuret dames, donc l'équipe des filles. Et donc j'ai appris. Mais ce qui m'a beaucoup aidée, c'était que comme les termes étaient en français, je n'avais pas beaucoup de surprises. Et ce qui fait que pour moi… Bien sûr, il y a quand même des concepts qui sont pas évidents, au fleuret. Ce qui fait que bon, j'ai du apprendre. Et puis c'est vraiment les filles. Et puis Franck Boidin qui m'a appris ce sport.

Pierre-Marie:
D'accord. Est-ce que vous avez pratiqué aussi un peu pour comprendre encore un peu mieux ?

Marine:
Un tout petit peu.

Pierre-Marie:
D'accord.

Marine:
Mais c'était juste pour s'amuser et ce n'était pas du tout sérieux. C'est juste pour un peu savoir, pour mieux approfondir mes connaissances. Mais vraiment, je suis vraiment l'interprète du groupe. Je ne suis ni arbitre, ni coach, ni entraîneur physique ou quoi que ce soit. Je suis juste tout simplement interprète.

Pierre-Marie:
Alors "tout simplement" interprète, c'est peut-être une exagération parce que je ne suis pas sûr que ce soit simple. Il n'y a pas seulement la question de traduire des mots ou des instructions, mais surtout, dans un contexte comme ça, sportif, de haut niveau, j'imagine qu'il y a beaucoup d'intensité. Quand les coachs font passer des messages, ils vont faire passer aussi des émotions, de la motivation, des choses comme ça. Est-ce que c'est quelque chose que vous essayez aussi de relayer dans votre traduction, c'est-à-dire le côté on va dire émotionnel au sens large ? Ou au contraire, c'est plutôt juste "je me concentre sur l'aspect langue et je reste assez neutre" ? Comment est-ce que ça marche ? Est-ce que c'est quelque chose qui se décide au cas par cas avec l'entraîneur ?

Marine:
Euh. Je suis complètement "interprète-caméléonne".

Pierre-Marie:
"Caméléonne", d'accord. OK.

Marine:
C'est-à-dire, vraiment, je me transpose dans la personne et en fait, je traduis directement toutes ses émotions. Donc en fait, je me concentre… Au départ, quand j'ai commencé ma carrière, j'ai essayé de traduire mot à mot, vraiment. Mais en fait, comme vous le connaissez, le japonais, français sont vraiment deux langues qui sont complètement différentes. En plus, la culture est différente. Donc de temps en temps, en fait, quand je traduisais trop directement, les choses ne passaient pas. C'est-à-dire quand par exemple… Je dis n'importe quoi. Mais imaginons qu'il y a un athlète qui ne se sente pas bien et qu'on lui dit… et que quand il y a un coach étranger qui lui dit "Alors comment ça va ? Est-ce que tout se passe bien ?" En général, dans la culture japonaise, les athlètes ont tendance à ne pas montrer leurs faiblesses. Ce qui fait qu'ils ont tendance à dire "Euh, oui, tout se passe bien". Mais après, c'est vrai que maintenant, les entraîneurs, dans le regard, ils arrivent à comprendre quand c'est vrai ou quand c'est pas vrai. Mais en fait, si je traduisais tel quel, c'est-à-dire comme un robot, je pense que la personne ne comprendrait pas. Donc exprès, je mettais un temps, un temps, un laps de… je mettais enfin je… Comment dire ça ? Ou par exemple au Japon. Les Japonais ne disent pas "non" tout de suite.

Pierre-Marie:
Oui, ça j'ai remarqué.

Marine:
Donc en fait, ils détournent. Ils détournent un peu…

Pierre-Marie:
ちょっと難しい。。。

Marine:
Voilà. Et voilà, à chaque fois, ils détournent un peu le sujet. Mais de temps en temps quand ça prend beaucoup, beaucoup de temps… Bien sûr, je traduis tel quel. Mais je dis "Bref, mais ça veut dire non !" Voilà, j'explique. Soit je rajoute des explications ou soit par exemple j'essaye de, dans mes mots que j'utilise, j'essaye d'expliquer qu'en fait c'est pas tout à fait… Il ne faut pas le prendre directement au premier degré.

Pierre-Marie:
Ouais, d'accord.

Pierre-Marie:
Ah oui, là c'est presque… Limite un rôle de médiateur ou d'ambassadeur entre deux cultures finalement. Parce que oui, c'est très différent.

Marine:
C'est ça. Et puis aussi, à l'inverse, parce que de temps en temps quand par exemple… En français, quand on parle, on dit les choses directement, mais de temps en temps, ça peut choquer quelqu'un, même en général, ou ça peut même genre… blesser quelqu'un alors que c'est pas du tout voulu. Donc dans ce cas,.. Ou même, de temps en temps, il y a des athlètes quand… en général les Français quand ils parlent, ils n'ont pas beaucoup d'expressions de visage par exemple. Donc en fait, quand l'athlète regarde son entraîneur, il dit "Est-ce que il est énervé par hasard ? Il me parle "neutrement". Mais est-ce qu'il est énervé par hasard ? " Ou ils me posent des questions. Donc en fait, à chaque fois je rajoute des explications ou dans le ton de ma voix, j'essaye de de faire comprendre qu'il n'est pas énervé ou que tout se passe bien mais qu'il a besoin d'expliquer certaines choses. Donc en fait, je suis complètement "caméléonne", donc même le jour des J.O. Après j'essaie d'être zen pendant quand par exemple, je vois qu'il y a un athlète qui parle ou je sais pas, quelqu'un qui parle en pleurant. Je ne vais pas commencer à pleurer en traduisant. Ça, je peux pas le faire ! Mais c'est vrai que plusieurs fois, comme ça faisait longtemps… On fonde, quand même, je pense, une grande famille. Plusieurs fois, j'ai été touchée dans les mots. Parce que je suis… Tout le monde, tous les jours. Enfin peut-être pas tous les jours mais bon… Mais heu… Ce qui fait que plusieurs fois… Moi-même je suis vraiment touchée par tout ce qui est énervement ou tristesse ou toute émotion possible. Quand je suis… Quand l'athlète est surpris, je peux être très surprise aussi en même temps. Mais j'essaye pas de me montrer. Mais j'essaye vraiment de montrer ce que les gens éprouvent autour de moi. Et puis, oui, donc je suis vraiment "interprète-caméléonne".

Pierre-Marie:
Ouais, c'est vrai qu'il y a tout le dit. Enfin, il y a le dit et le non-dit et le non-dit heu…

Marine:
Après, au Japon, il y a l'expression "空気を読む”. Moi je traduis ça "lire dans l'air".

Pierre-Marie:
Ouais, c'est ça, ouais.

Marine:
Et puis je dis ah "Là, il faut lire dans l'air". "Là il faut rentrer" ou "Là il faut rien dire".

Pierre-Marie:
Alors est-ce qu'aussi une partie de votre travail, c'est non pas dans la traduction, mais peut-être dans les briefings que vous avez séparément avec les entraîneurs, d'expliquer un peu ça ?

Marine:
Oui, bien sûr. À chaque fois. Et puis même de temps en temps, ils me demandent il y a certaines réactions qu'ils ne comprennent pas des Japonais. Et puis je suis sans cesse en train d'expliquer.

Pierre-Marie:
Ah d'accord, c'est vraiment très intéressant parce que en plus… C'était une question que j'avais notée, mais là en plus c'était les Jeux Olympiques. Donc je me dis quand même, on est : les Jeux Olympiques, le sport de haut niveau, il y a beaucoup de pression, il y a beaucoup d'enjeu. Heu…les sentiments peuvent être violents. Les réactions peuvent être violentes. Est-ce que vous vous avez ressenti cette pression particulière dans votre travail ?

Marine:
Alors je pense que c'était vraiment le pic des émotions au moment des Jeux Olympiques, au moment de la préparation, surtout. Et puis c'est normal. Mais en fait, les Jeux Olympiques, c'est tellement spécial comme événement. C'est le plus grand événement sportif qui se déroule tous les quatre ans. Donc il y a une énorme pression qui retombe sur les épaules des athlètes, mais aussi des entraîneurs, et puis du staff, et puis même aussi, je pense même jusqu'au pays en fait. Donc. Il y a eu toutes sortes d'émotions, que ce soit négatives ou positives, mais c'est vrai que c'était… Moi-même, en général…. Enfin, j'ai jamais vraiment heu… J'ai été un peu "surdépassée" par toutes ces émotions à un moment. Et puis même à un moment, moi aussi j'ai eu besoin qu'on m'écoute…

Pierre-Marie:
Oui, c'est ça.

Marine:
… parce que c'est vrai que c'est un métier où on est beaucoup à l'écoute des gens Et puis moi, dans mon caractère, je suis quelqu'un de très pipelette plutôt. Mais comme j'étais vraiment beaucoup beaucoup mais beaucoup trop à l'écoute… Donc à un moment, j'ai été "surdépassée" par tout ça et… Mais en fait, on forme vraiment une équipe. Je soutiens vraiment les athlètes et les entraîneurs. Mais c'est vrai que eux aussi me soutiennent beaucoup.

Pierre-Marie:
C'est bien, ça.

Marine:
Donc… Mais voilà, on a on a surmonté tout ça. Mais après ça a été tellement beau comme résultat donc…

Pierre-Marie:
Alors, c'est vrai que le dans le pays, ça a fait un peu de bruit et j'en ai pris conscience hier. C'est une anecdote, mais j'étais chez le dentiste et il commence à me parler des jeux Olympiques. Et donc hier je lui dis "Demain j'interviewe la personne qui a fait la traduction pour l'équipe d'escrime." "Oh là là, dîtes lui merci, おめでとう!”

Marine:
Oh, c'est gentil !

Pierre-Marie:
Donc tout le monde était à fond je pense, ouais.

Marine:
Ben en fait, on n'était pas trop au courant de ce bruit qu'il y a eu au Japon. Mais c'est vrai qu'après, après chaque médaille, quand les coachs étaient interviewés, il y avait les journalistes qui étaient là. Il y avait peut-être une cinquantaine de journalistes à chaque fois qui venaient nous voir en disant "Oh là là, c'est le "Fencing Fever" au Japon actuellement, tout le monde parle de l'escrime". Et c'est vrai que, en fait, la première médaille qui a été faite, c'était par le fleuret dames. Et ce jour-là, en fait, le judo n'a pas fait de médaille et en fait ça a été publié mais partout, parce que c'était la seule médaille japonaise du jour. Et après coup, on m'avait expliqué que, en fait, ça joue beaucoup, même si par exemple on fait une médaille, mais que le jour même il y a une autre, il y a un athlète beaucoup plus célèbre qui fait une médaille, en fait, on va plus parler de cet athlète que de l'autre sport. Donc en fait, je pense que c'est ça qui a fait le déclic. Et ensuite, tous les jours, on a commencé à faire des médailles. Et donc je pense que les gens ont commencé à suivre les épreuves. Et puis c'est vrai que moi aussi j'ai eu beaucoup de retours de la part de gens, même que je ne connaissais pas du tout. C'était vraiment gentil.

Pierre-Marie:
Et alors, donc là, vous continuez ce travail avec la Fédération d'escrime ?

Marine:
Oui, mais en fait, je vous ai dit que je suivais l'équipe toute l'année. Mais c'est vrai que je ne suis pas interprète à plein temps. C'est-à-dire je peux, je m'occupe aussi d'autres sports et… Mais après c'est vraiment avec l'escrime que je suis… comment expliquer ça ?

Pierre-Marie:
Non mais je comprends, je pense que c'est votre activité principale en tant qu'interprète. Et puis au milieu de tout ça, vous avez peut-être des missions plus courtes.

Marine:
Oui, c'est ça. Vraiment ponctuelles. En fait, je m'occupe de l'escrime, mais pour les autres disciplines, c'est vraiment ponctuellement, que ce soit pour des compétitions internationales qui se déroulent au Japon ou pour un sport ou soit… Je m'occupe aussi de toutes réservations pour les sports automobiles. Donc là c'est le côté vraiment administratif, donc je ne suis pas du tout en contact avec les athlètes ou les équipes. Donc soit je peux être très proche des équipes, soit je suis vraiment le côté le "back staff", mais je suis toujours interprète.

Pierre-Marie:
J'imagine que l'aspect, la partie où vous êtes proche des équipes est la plus intéressante.

Marine:
C'est vrai. C'est pour ça que ça fait sept ans que je que je fais ce métier. Je ne peux pas vous mentir, c'est vraiment très excitant.

Pierre-Marie:
Peut-être le plus fatiguant émotionnellement, mais le plus intéressant ?

Marine:
Oui, le plus intéressant. Non mais après, je vous assure que les gens dans le monde de l'escrime, vraiment dans l'équipe japonaise, tout le monde… C'est vraiment des bonnes personnes qui m'entourent. Donc en plus, on voit les athlètes progresser tous les jours au quotidien. Et puis je ne vous mens pas, mais l'équipe n'était pas forte avant. Ils faisaient des résultats de temps en temps, mais après, ce n'était pas du tout régulier comme résultat. Et là, tous les ans, que ce soit les garçons ou les filles, où que ce soit le fleuret, le sabre ou l'épée, en fait on fait que que des bons résultats. Et c'est vrai que c'est très passionnant de suivre ces équipes-là et de les aider. Et puis c'est très fatiguant parce que ça m'a triplé le travail. Mais c'est vrai que c'est très passionnant. Et puis les gens sont de bonnes personnes.

Pierre-Marie:
Pourquoi est-ce que, pour parler plus largement et sortir un peu de l'escrime et parler de votre carrière, pourquoi est-ce que vous avez choisi le sport comme spécialité dans l'interprétariat ?

Marine:
Alors tout d'abord, j'ai toujours aimé le sport. Et puis quand j'étais petite, quand j'étais en CE2, je me souviens, j'ai vu le Cirque du Soleil et j'ai vu Kidam. Je me souviens très bien. Et puis mon rêve était de devenir acrobate. Mais bon, les circonstances ont fait que je n'ai pas pu faire des études pour ça. Et donc j'ai eu mon baccalauréat. Et puis ma mère m'avait promis que, après mon baccalauréat, je pouvais faire ce que je voulais. Donc jusqu'au baccalauréat, je n'ai fait que étudier, étudier, étudier. Et ensuite, quand j'ai eu mon bac, j'ai décidé d'aller dans une fac de sport japonaise et j'ai enfin débuté ce que je voulais faire depuis que j'étais toute petite. Donc j'ai été dans un club de trampoline.

Pierre-Marie:
Ah d'accord.

Marine:
Et voilà. Donc j'ai commencé comme ça. Et par contre j'étais complètement adulte, donc je n'avais pas du tout. Euh. Je n'étais pas du tout douée. Mais vraiment, j'ai pris plaisir pendant quatre ans à faire du trampoline. En plus, j'étais dans une fac de sport, donc maintenant j'ai même ma licence pour être professeur d'EPS dans des écoles japonaises. Mais c'est vrai que après, quand j'ai décidé de… Mon travail que je voulais faire… Au départ, je n'étais pas interprète et… Au départ, je travaillais dans un club de sport au Japon et en fait, jamais je voulais faire interprète ! Enfin, l'interprétariat ne m'avait jamais vraiment intéressée parce que je pensais à l'époque que ça me demandait beaucoup trop de responsabilités. Parce qu'en fait, si on traduit aucun mot, enfin aucun sentiment à soi-même, on fait que traduire ce que la personne pense, qu'une tierce personne parle. Et c'est vraiment pas évident. Et ça demande vraiment beaucoup trop de responsabilités puisqu'il suffit que la nuance soit différente pour que tout soit différent. Donc je prends toujours l'exemple de… Quand on est petit, de temps en temps, on peut courir vite, mais c'est parce qu'on court vite que tout le monde devient un athlète. Donc j'étais bilingue au baccalauréat et j'ai pris l'option internationale du japonais et j'ai eu l'OIB japonais. J'étais déjà bilingue à 17 ans, mais j'ai jamais voulu faire ça comme métier. Pour moi, c'était juste un plus. Et après coup, en fait, j'ai commencé à aider l'équipe nationale de trampoline qui faisait des stages, soit des Français qui faisaient des stages au Japon, au centre national ou soit des Japonais qui faisaient des stages en France. Et c'est de là que j'ai commencé à vraiment … j'ai découvert ce métier d'interprète pour les sportifs et c'est pour ça que je me suis dit… Enfin, j'ai arrêté de travailler dans ce club de sport. Et puis je me suis dit que j'allais commencer ma carrière d'interprète pour les sportifs. J'ai annoncé à tout le monde que j'allais être "interprète pour le sport" alors que c'est un métier qui n'existe pas. Il n'y a pas d'école où il n'y a pas d'entreprise qui fait qu'on peut débuter sa carrière. Et donc il y a des… Puis tout de suite, j'ai découvert que l'escrime avait des entraîneurs français. J'ai découvert aussi qu'il y a d'autres disciplines en fait, parce que maintenant il y a une tendance. L'État japonais, ils font beaucoup appel aux entraîneurs étrangers. Et ce qui fait que voilà, il y a de plus en plus de nécessités.

Pierre-Marie:
Peut-être dans le rugby ou des sports…

Marine:
Mais même plus en fait. Parce que avant, oui, dans les dans les sports populaires soi-disant : le rugby, le football, le baseball. Au Japon, il y a toujours eu des interprètes, le patinage aussi. Il y a toujours eu des interprètes. Mais c'est vrai que pour les autres disciplines, il y en avait pas. Et là de plus, il y a une tendance en fait de "globalisation". Voilà.

Pierre-Marie:
Ouais, d'accord.

Marine:
Donc euh, par exemple, jusqu'aux Jeux de Paris, il n'y avait pas que pour l'escrime, mais il y avait aussi pour l'équipe de keirin… Pour l'équipe de keirin aussi, il y avait eu un entraîneur, enfin plusieurs entraîneurs étrangers. Euh, pour l'aviron aussi, je crois qu'il y avait un entraîneur français. Voilà. Donc il y avait plusieurs entraîneurs français, en fait.

Pierre-Marie:
D'accord. Donc, dans la délégation olympique japonaise aux JO de Paris, il y avait aussi beaucoup d'interprètes, alors ?

Marine:
Oui, mais en fait, malheureusement, ce métier n'est pas encore très connu et donc il n'y a pas trop ce postes d'interprètes. En fait, l'interprète n'est pas vraiment considéré comme un métier, ce qui fait que même en général, en fait, on demande de faire beaucoup plus à un interprète, soit par exemple manager ou de faire autre chose, la comptabilité ou quelque chose. Donc il y avait des interprètes, mais ils n'étaient pas nommés interprètes, ils étaient nommés manager ou "technical staff", mais ils n'étaient pas nommés comme interprètes. Donc malheureusement, c'est pas encore un métier qui est très connu et souvent, moi-même, on me pose la question, on me dit "Ah oui, donc en fait les athlètes ils ne parlent pas anglais, c'est pour ça que tu es présente et tout." Mais c'est même pas ça en fait. Parce que quand par exemple un athlète demande de l'aide à un physio par exemple, on ne va jamais lui dire "Ah, donc l'athlète, il peut pas faire sa muscu tout seul ?" Jamais on va lui dire ça. En fait, c'est un métier très spécialisé, mais qui n'est pas très reconnu encore parce que les gens, ils se disent "Non, mais ils peuvent se débrouiller en anglais et tout". Mais en fait, c'est vrai qu'au Japon, les Japonais ne parlent pas bien anglais, encore. Il y en a bien sûr qui parlent très bien, mais c'est vrai que dans l'éducation en général, les Japonais ont du mal, ont toujours du mal avec l'anglais. Et en plus, dans mon cas, mon entraîneur était français. Bien sûr que tous les trois entraîneurs que je vous ai nommés, ils parlent très bien anglais, mais c'est pas leur langue natale non plus. Donc pour tout ce qui est côté… pour tout ce qui est réaction spontanée ou mentalité, ou pour tout ce qui est vraiment des vraies émotions, disons, c'est en français que ça ressort.

Pierre-Marie:
Donc c'est intéressant parce que, avant de commencer l'enregistrement, on a aussi un petit peu parlé d'intelligence artificielle et de l'impact de l'intelligence artificielle sur les métiers de la traduction et tout ça. Mais en écoutant un peu votre parcours et puis le travail que vous faites au jour le jour dans cette équipe, je me dis "Bon, ça c'est pas un travail qui peut vraiment être fait par l'intelligence artificielle finalement".

Marine:
Et heureusement !

Pierre-Marie:
Heureusement pour vous, bien sûr.

Marine:
Mais c'est vrai que maintenant, moi-même je… Google Traduction m'aide beaucoup par exemple. Mais en fait ils sont pas… enfin Google Traduction, tout ce qui est intelligence artificielle en fait… Soi-disant tous les robots ne sont pas doués pour traduire les émotions, les émotions humaines. Donc là, je pense que l'interprète va enfin.., ce métier ne va pas disparaître pour 50 ans, je pense.

Pierre-Marie:
Et même le japonais a l'air d'être particulièrement difficile pour l'intelligence artificielle, parce que je trouve que souvent les traductions… Autant entre, je ne sais pas, le français et l'allemand, ou le français et l'italien, ou le français et l'anglais, c'est presque parfait. Quand c'est un texte, je parle de traduire un texte. Autant quand c'est français et japonais ou anglais et japonais. L'intelligence artificielle est perdue souvent par l'absence de sujet…

Marine:
Oui !

Pierre-Marie:
… dans les phrases en japonais. Et le sujet alors… "il" devient "elle" ou on ne sait pas trop… Ça devient incompréhensible en fait.

Marine:
Moi-même, de temps en temps je suis perdue parce que quand les japonais parlent, ils ne disent pas le sujet, donc je ne sais pas s'ils parlent d'eux ou s'ils parlent d'un adversaire ou s'ils parlent d'une expérience qu'ils avaient eue auparavant. Donc à chaque fois, je suis tout le temps en train de leur poser des questions. "Attends, attends, tu parles de qui ?" Après, c'est l'inverse aussi parce que en français aussi on peut commencer… C'est par rapport à tous les COD, COI. En fait tout est inversé en japonais. Donc je commence à traduire d'un sujet, mais après il faut que je devine à quoi ça va aboutir à la fin. Et puis après, la plupart du temps j'arrive à deviner. Donc en fait je traduis vraiment dans le bon sens ou soit je coupe mes phrases très "courtement". Mais c'est vrai que, de temps en temps, c'est pas évident.

Pierre-Marie:
Mais j'ai l'impression que dans ce métier contrairement peut-être à quelqu'un qui va traduire des livres, c'est pas forcément absolument nécessaire d'être un expert total en grammaire par exemple.

Marine:
C'est vrai.

Pierre-Marie:
Puisque c'est quand même aussi beaucoup dans la rapidité. Donc il faut il faut juste faire passer les messages correctement bien sûr. Il faut évidemment un niveau de base de grammaire assez fort. Enfin fort sûrement.

Marine:
Oui.

Pierre-Marie:
Mais je pense qu'il y a… C'est peut être pas la qualité principale de l'interprète d'être un as, un crack de la grammaire.

Marine:
Alors moi je ne suis pas du tout un crack de la grammaire !

Pierre-Marie:
Ok, ça rassurera beaucoup de monde…

Marine:
Et vous avez totalement raison, parce que c'est vraiment la rapidité qui compte. Et puis moi je pense que dans ce métier, c'est vraiment la compréhension qui compte. Donc même si on est, on comprend très bien, si par exemple on ne comprend pas le second degré ou quand on ne comprend pas vraiment les expressions, certaines expressions, en fait on se trompe, on se trompe complètement.

Pierre-Marie:
Est-ce que vous avez dit aux entraîneurs français d'éviter le second degré et l'ironie au Japon ?

Marine:
Mais en fait, de temps en temps… alors ça, c'est vraiment ma façon de faire. Mais je traduis tel quel, parce que ça montre un peu… Parce qu'en fait, quand on commence à dire, quand on demande aux gens d'éviter certaines choses, après quand il faut être poli devant les personnes qui les personnes…

Pierre-Marie:
Plus âgées ou le respect des…

Marine:
… plus âgées ou voilà, ou qui ont un certain statut, je pense que oui, il faut éviter certaines choses, mais quand on est dans la même équipe, de temps en temps, je pense que c'est bien de montrer ce côté, cette culture qui est différente, aussi.

Pierre-Marie:
Intéressant.

Marine:
Et puis en plus, ça fait partie aussi de leur caractère. Donc tout ce qui est ironie, c'est complètement français. Et puis de temps en temps, c'est un peu dommage de cacher ce côté-là qui pourrait être drôle. Donc, de temps en temps, je traduis tel quel. Et puis ça fait rigoler les gens.

Pierre-Marie:
Est-ce qu'il y a de temps en temps des malentendus assez drôles ou comiques, ou des anecdotes ?

Marine:
Des malentendus ? Ben j'essaie de faire qu'il n'y ait pas de malentendus. Donc je pense qu'il n'y a pas de malentendus. Mais oui, on rigole souvent.

Pierre-Marie:
Ouais, d'accord. Est-ce que… On a déjà un petit peu parlé de tout ça, mais est-ce que vous voyez d'autres qualités qui sont importantes au cœur de ce métier d'interprète ? Peut-être des choses dont on n'a pas encore parlé.

Marine:
Je pense qu'il faut pour être interprète en général… alors ça c'est vraiment ma philosophie. Mais je pense qu'il faut aimer les gens. Il faut être intéressé par ce que les gens pensent. C'est en fait on… Moi, je dis… Souvent des journalistes… depuis ces JO, j'ai beaucoup été interviewée par des journalistes japonais. Et puis souvent en fait, ce que j'ai sorti comme ça, naturellement, je dis moi je traduis pas des mots, mais je traduis des sentiments, je traduis des cœurs. C'est vraiment l'expression que j'ai dite. J'ai dit 言葉を訳すではなくて、心を訳しています.

Pierre-Marie:
Ah ok, ok.

Marine:
Donc c'est vraiment au niveau des sentiments pour moi, c'est… En fait, si on se focalise juste aux mots, en fait même les robots peuvent le faire, mais c'est pas… c'est beaucoup plus profond. Donc pour vraiment traduire des émotions, il faut vraiment s'intéresser à la personne. Et pour s'intéresser à la personne, il faut aimer les gens. Parce qu'en fait, si on aime personne, on s'intéresse pas aux gens.

Pierre-Marie:
Oui, c'est sûr. Il vaut mieux.

Marine:
Mais ça c'est ma philosophie. Après peut-être qu'il y a des gens qui peuvent le faire en en séparant complètement leurs propres idées aux autres. Mais moi en général j'aime bien, j'aime bien. Je suis beaucoup intéressé par ce qui m'entoure et puis je fais ça avec amour en fait.

Pierre-Marie:
D'accord. Est-ce que… Donc vous vous avez, je crois, la double culture française et japonaise. Vous êtes métisse franco-japonaise, n'est-ce pas?

Marine:
Oui. Ma mère est française et mon père est japonais.

Pierre-Marie:
Est-ce que vous pensez que c'est un travail qui est accessible à des personnes qui sont simplement françaises ou japonaises ? On a parlé de tout le sous-entendu culturel, etc. Vous êtes au cœur de ça ?

Marine:
Oui, je suis vraiment au cœur de ça. J'ai… depuis toute petite, j'avais des amis qui étaient français… Enfin, j'étais d'abord dans une famille qui était complètement mixée, et puis mes amis aussi. J'avais des amis français et japonais, donc j'ai toujours fait interprète quand par exemple, on était en groupe, quand il y avait des Japonais qui ne parlaient pas français ou des Français qui parlaient pas japonais. Et puis j'ai toujours fait ça, mais pas pour le travail, mais c'est juste pour le plaisir et…

Pierre-Marie:
Parce que vous aimez les gens !

Marine:
Oui, parce que j'aime bien les gens ! Mais aussi euh… Je sais pas. Après, je pense qu'on peut-être très bon en langues. Mais, je pense qu'il faut avoir une certaine base linguistique pour pouvoir faire interprète quand même. Et pour comprendre ces deux cultures, je pense qu'il faut avoir… Il faut comprendre le sous-entendu ou le second degré. Donc je pense qu'il faut avoir une certaine base linguistique, mais après c'est vrai qu'avec le temps il y a des gens qui commencent à comprendre la culture. Donc c'est pas parce qu'on n'a pas un bon niveau au départ qu'il faut se dire que c'est pas fait pour les interprètes débutants. Je sais pas, mais je pense qu'il faut avoir un certain niveau quand même.

Pierre-Marie:
D'accord. Oui, bien sûr. De langue et de connaissances culturelles, bien sûr.

Marine:
Oui. Mais en même temps, moi aussi je connais… J'ai des codes japonais que je ne connais pas non plus. J'apprends sur le moment.

Pierre-Marie:
D'accord. Ouais.

Marine:
Moi aussi j'essaie de faire ressortir mon côté français de temps en temps !

Pierre-Marie:
D'accord.

Pierre-Marie:
Ok, ok, très bien. Est-ce que… Je pense que j'ai plus vraiment de questions ? Est-ce que vous avez quelque chose à rajouter ou peut-être un mot d'encouragement pour les gens qui nous écoutent et qui apprennent le français ?

Marine:
Alors tout d'abord, j'admire vraiment les personnes, les Japonais qui apprennent le français, mais dès l'âge adulte, parce que moi c'est vrai que c'est ma langue, c'est ma langue natale en fait. Donc j'ai appris le japonais après coup, mais j'admire vraiment les Japonais qui apprennent ça parce que moi je pense que jamais, jamais j'aurais commencé à apprendre le français qui est une langue vraiment très compliquée. Et puis euh, donc bon courage à tous ceux qui étudient la langue française. Et je pense qu'il y a des moments qui pourraient être très, très difficiles. Mais pour n'importe qui, que ce soit pour des gens qui sont complètement bilingues comme moi, ou pour des gens qui commencent à apprendre à étudier cette langue là, en fait, c'est pour la vie. Donc, l'apprentissage est pour la vie.

Pierre-Marie:
C'est ça, On ne s'arrête jamais.

Marine:
Voilà, on s'arrête jamais. Et moi aussi je vais toujours continuer à améliorer mes capacités linguistiques et mes connaissances aussi sur le sport. Donc c'est vraiment bon courage à tout le monde. Et puis merci d'avoir écouté jusqu'à la fin ce podcast.

Pierre-Marie:
Merci beaucoup Marine. Et puis bonne chance pour vos prochains défis, olympiques ou pas, avec les différentes équipes dans lesquelles vous travaillez.

Marine:
Merci beaucoup. Merci Pierre-Marie.

Pierre-Marie:
Encore merci pour votre participation.

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NOTES

  • Le compte Instagram de Marine Gokura
  • L’escrime japonaise a en fait ramené 17 médailles des JO de Paris, avec notamment la médaille d’or à l’épée individuelle hommes avec Kano Koki.

Crédit photos : ©FIE 2024/augustobizzi/日本フェンシング協会 pour la photo en titre et l’autre photo avec les drapeaux japonais. Marine Gokura pour les autres photos.